Ras-le-bol des diagnostics !

Ça ne sert à rien, ça prend du temps. Allez hop, je m’en passe ! Non, je vais être plus malin, je vais en produire un vieux. Tentant, n’est-ce pas ?

Mais est-ce une bonne idée ?

Juger vous-même avec cette affaire.

Je vous raconte cette semaine l’histoire de deux sociétés qui concluent un bail commercial pour des locaux de 117 m² et deux emplacements de parking en région parisienne, à effet au 1er juin 2012.

Mais la société P, preneuse, change d’avis, elle ne veut plus les locaux.

Elle propose alors à la société B de conserver le dépôt de garantie de 7000 €.

Mais, la société B refuse.

Le 15 février 2013, la société bailleresse fait délivrer à la société preneuse un commandement de payer les loyers et charges.

La société P conteste ce commandement et saisit le tribunal d’une demande de restitution du dépôt de garantie et de versement de dommages et intérêts.

De son côté, la société B sollicite de voir constater la résiliation du bail et demande la condamnation au paiement des loyers et charges.

Et se pose alors la question de l’état des risques naturels et technologiques. L’article L 125 – 5 du code de l’environnement dispose en effet que le bailleur à l’obligation de joindre au bail commercial un état des risques naturels et technologiques de moins de six mois (R 125 – 25 du code de l’environnement).

Et la sanction prévue est sévère : le locataire peut demander la résolution du contrat ou une diminution du prix.

En l’occurrence, si le bailleur avait fourni cet état, celui-ci datait du 2 octobre 2009. Il n’était donc plus valable.

Le locataire va s’engouffrer dans cette brèche, suivi par la Cour d’appel.

Celle-ci va prononcer la résolution du contrat aux torts de la bailleresse. Les loyers demandés n’étaient donc pas dûs, pas plus que le dépôt de garantie.

Belle victoire pour la société P !

Mécontente, la société B forme un pourvoi en cassation.

Elle soutient que seule la gravité du manquement d’une partie à ses obligations peut justifier la résolution du contrat.

Or, la Cour ne s’est pas posé la question du caractère grave ou non de la fourniture d’un document périmé.

À votre avis, la société B a-t-elle obtenu gain de cause ?

La réponse est oui.

Dans cet arrêt du 21 septembre 2023 (RG n° 22 – 15. 850), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.

Elle se fonde sur le droit des contrats et indique que si la condition résolutoire est toujours sous-entendue lorsque l’une des parties ne satisfait point à son engagement, cette résolution n’est pas automatique.

En clair, une partie peut toujours se plaindre du non-respect par l’autre de ses obligations mais cela ne vaut pas pour autant disparition automatique du contrat.

Le créancier a le choix entre forcer l’autre à s’exécuter et demander la résolution du contrat avec des dommages et intérêts. Ici, la Cour d’appel avait considéré qu’il n’était pas nécessaire de démontrer un préjudice, elle estimait que la résolution était automatique en l’absence d’état des risques de moins de six mois.

La Cour de cassation dit non : il fallait vérifier si le manquement était grave.

En clair :

  1. les diagnostics prévus par la Loi sont obligatoires,
  2. si ces diagnostics venaient à manquer, les foudres de l’enfer ne vont pas nécessairement tomber sur le bailleur.

Mais cela signifie qu’il y aura une appréciation au cas par cas et donc un contentieux possible.

Moralité : respectez les obligations prévues par la loi et vous limiterez les risques.