« C’est pas moi, c’est l’autre »

Ce titre du film de Jean Boyer, sorti en 1962 est une belle illustration de la vidéo du jour.

Je vous raconte cette semaine l’histoire d’une société à laquelle son bailleur a garanti la possibilité de faire de la sous-location courte durée pour une clientèle n’élisant pas domicile dans le local.

La société A, ayant une activité de gestion de biens, fait l’acquisition d’un appartement en 1997.

En 2012, elle loue cet appartement à la société B, spécialisée dans la location d’appartements meublés pour de courtes durées ;

Le contrat autorise la société B à sous-louer le logement de manière temporaire.

La société B loue ainsi l’appartement pour de courtes durées à une clientèle n’y élisant pas domicile.

Autrement dit, elle fait de la location type Air BnB.

La mairie de Paris s’en aperçoit et assigne bailleur et preneur devant le tribunal pour les voir condamnés à une amende civile de 50.000 € chacun.

En effet, l’article L631-7 du code de la construction et de l’habitation dispose que ce type d’activité ne peut être réalisé que dans un local à usage commercial.

Or, l’appartement est à usage d’habitation.

Le tribunal condamne les deux sociétés in solidum (=c’est à dire ensemble) au paiement d’une amende de 50.000 €.

La société B relève appel.

Elle estime, en effet, que le contrat de bail l’autorisait à exercer cette activité de location de courte durée.

Elle n’avait pas, selon elle, à se préoccuper de l’usage d’un bien.

La cour d’appel aggrave la situation puisque la société B est condamnée à une amende de 50.000 €.

La société A est condamnée à une amande de 25.000 €.

La cour constate que la société B est :

  • Un professionnel de la location de courte durée ;
  • Que c’est elle qui avait imposé les termes du contrat de bail et qu’elle n’y précisait pas faire de la location touristique de courte durée mais seulement des locations meublées pour des durées déterminées,
  • Qu’elle connaissait la règlementation relative au changement d’usage,
  • Qu’il appartenait tant au propriétaire qu’au locataire de s’assurer de l’obtention des autorisations personnelles de changement d’usage

Mécontente, la société B forme un pourvoi en cassation.

Elle soutient qu’il appartenait au bailleur d’obtenir le changement d’usage.

Elle ne pouvait ainsi, selon elle, être condamnée au paiement d’une amende.

A votre avis, a-t-elle obtenu gain de cause ?

La réponse est non.

Dans cet arrêt du 15.02.2023 (RG n°22-10.187), la Cour de cassation rejette le pourvoi.

La Cour de cassation rappelle que :

  • Dans certaines communes, ici Paris, le changement d’usage est soumis à autorisation préalable,
  • Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage n’y élisant pas domicile est un changement d’usage,
  • Toute personne qui ne se plie pas à ces règles est condamnée à une amende ,

La société B a exercé une activité en contravention de la loi est redevable de l’amende prévue.

Un conseil : vérifier l’usage du bien, nonobstant ce qui est autorisé par le bail.