«  Si ce n’est toi, c’est donc ton frère » disait le Loup dans la fable Le Loup et l’agneau de Jean de la FONTAINE.

Appliqué au droit, cela donnerait un sous-titre du type : « de l’importance de bien dénommer les parties à un contrat, en particulier à un bail commercial ».

Je vous raconte cette semaine l’histoire d’un preneur à bail commercial dont l’identité mentionnée sur le contrat va lui causer bien des soucis.

En 1996, un bail commercial est signé entre la société W, bailleur, et Monsieur M enseigne espace coiffure.

Les loyers ont toujours été payés par la société Espace Coiffure jusqu’à ce qu’elle rencontre des difficultés de trésorerie.

Les loyers n’étant plus payés, le bailleur délivre à Monsieur M un commandement de payer visant la clause résolutoire le 5/05/2011.

Monsieur M assigne la société en nullité du commandement.

La société W notifie à Monsieur M une mise en demeure de payer les loyers ainsi qu’un congé avec refus de renouvellement de bail et de versement d’indemnité d’éviction.

Monsieur M et la société ESPACE COIFFURE assignent le bailleur en nullité de la mise en demeure.

La société bailleresse demande reconventionnellement que :

  • L’action de la société ESPACE COIFFURE soit déclarée irrecevable, comme tiers au contrat,
  • Soit constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à l’égard de Monsieur M enseigne Espace Coiffure.

Les juges de la cour d’appel jugent que le contrat de bail a été conclu avec Monsieur M en sa qualité de gérant de la SARL ESPACE COIFFURE en retenant trois éléments :

  • La SARL existait au moment de la signature du bail et avait pour gérant Monsieur M,
  • Monsieur M n’est pas lui-même immatriculé au RCS,
  • Les loyers ont toujours été payés par la SARL, sans contestation du bailleur.

Le commandement délivré à Monsieur M ainsi que le congé étaient donc nuls, faute d’avoir été délivrés au preneur, à savoir la SARL.

La société bailleresse a régularisé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt estimant que le véritable preneur était Monsieur M.

A votre avis, qui gagné ?

La cour de cassation, dans cet arrêt du 17 juin 2021 (n°20-15.441) donne raison à la société bailleresse et casse l’arrêt d’appel.

Elle lui reproche d’avoir dénaturé le contrat de bail, lequel stipulait que les locaux avaient été loués à Monsieur M espace coiffure.

Deux enseignements peuvent en être retirés :

  • Peu importe l’auteur du règlement, le preneur est celui dont le nom figure sur le bail,
  • La dénomination des parties doit être indiquée avec soin.

Dans cette espèce, cela signifie que Monsieur M, étant le preneur en son nom personnel, est responsable du paiement des loyers sur son patrimoine personnel.