Minimiser c’est mentir?

Je vous raconte cette semaine l’histoire d’une société qui vend à une autre un immeuble comportant un certain nombre de locaux loués.

Le 24 décembre 2014, la promesse de vente est signée entre les deux parties pour la somme de 2.352.000 €.

La vente est régularisée le 31 mars 2015.

L’acheteur découvre alors que le locataire le plus important de l’immeuble avait indiqué au vendeur, pendant le délai de la vente : 

  1. Qu’il lui restituerait l’un des lots (il en louait trois),
  2. Qu’il conditionnait le maintien du contrat dans les deux autres lots à une diminution substantielle de loyers,

L’acheteur estime alors avoir été victime d’une réticence dolosive du vendeur qui a tu ces informations.

Il l’assigne en dommages et intérêts, indiquant que dans la promesse figurait l’engagement du vendeur à informer son acheteur jusqu’à la vente de tout changement qui pourrait affecter de manière significative l’immeuble et sa situation locative.

La Cour d’appel lui donne raison et lui alloue une somme de 80.000 € à titre de dommages et intérêts.

Le vendeur forme un pourvoi en cassation.

Il soulève deux arguments : 

  1. Il a eu connaissance des difficultés financières de son locataire le 31 décembre 2014 soit après la signature de la promesse de vente,
  2. La Cour d’appel n’a pas caractérisé le caractère intentionnel du défaut d’information et le caractère déterminant de l’information manquante,

A votre avis, a t’il obtenu gain de cause?

La réponse est non.

La Cour de cassation, dans cet arrêt du 16 septembre 2021 (pourvoi n°20-19.229), rejette le pourvoi.

La Cour juge que la clause prévoyant l’obligation pour le vendeur d’informer l’acheteur jusqu’à la vente de tout changement qui pourrait affecter de manière significative l’immeuble et sa situation locative : 

  1. Avait pour effet de mettre à la charge du vendeur l’obligation de tenir son acheteur informé de la situation jusqu’à la vente,
  2. Démontre que la situation locative était un élément déterminant du consentement de l’acheteur.

A retenir deux enseignements : 

  1. Quand l’acquéreur estime qu’un élément est déterminant de son consentement, il a tout intérêt à faire intégrer à l’acte une clause en ce sens,
  2. L’obligation d’information ne doit pas être prise à la légère. En l’occurrence, le vendeur avait envoyé un courriel à son acquéreur lui indiquant qu’il y avait une difficulté de paiement mais était rassurant sur le recouvrement des loyers par un simple commandement de payer.